MLA’16, CHLA/ABSC à la québécoise
Déjà plus d’une semaine depuis la fin du congrès Mosaic | Mosaïque. Avec le recul et la magie des enregistrements audio (qui permet une certaine ubiquité!), ce billet fait un bilan de la participation des bibliothécaires du Québec qui ont présenté leurs travaux au congrès.
La présentation de Vera Granikov et la mienne (Monique Clar) ont déjà été abordées dans le billet Les présentations éclairs à la canadienne et l’affiche de Tara Landry et Alex Amar-Zifkin dans le billet Les affiches. Beaucoup d’affiches.
Jill Boruff, de l’Université McGill, a présenté une partie des résultats de l’examen de la portée (« scoping review ») qu’elle a effectué avec Pamela Harrison (Alberta Health Services) sur les études évaluant les compétences informationnelles chez les étudiants des professions paramédicales. Jusqu’à présent, aucune revue de la littérature n’avait été publiée sur ce sujet, pour cette clientèle. Elles ont retenu 136 études pour l’ensemble des sciences paramédicales et Jill a présenté les résultats pour les 20 études touchant les domaines suivants : physiothérapie, ergothérapie, orthophonie et audiologie. Dans la majorité des études (n=14), l’évaluation a été faite par un devoir dans le cadre d’un cours. Beaucoup de variation dans les types de devoirs et questions posées aux étudiants : une bonne source d’idées à explorer pour créer nous-mêmes des questions d’évaluation. Pour les autres études, le test Fresno, qui évalue les compétences en pratique factuelle, a été utilisé (en version adaptée/modifiée) dans 3 études, l’outil Research Readiness Self-Assessment dans une étude et un test local a été développé dans une autre étude. Finalement, les auteures ont été un peu surprises de constater que seulement 6 des 20 études impliquaient un bibliothécaire, certainement une occasion pour nous d’amorcer de nouvelles collaborations avec des professeurs. La présentation sera disponible sur l’espace web de Jill à l’Université McGill : https://www.mcgill.ca/library/librarians/jill-boruff
Lorie Kloda, éditrice en chef de la revue Evidence Based Library and Information Practice et bibliothécaire à l’Université Concordia a parlé de la pratique factuelle en sciences de l’information et de quelle façon celle-ci peut s’intégrer à l’évaluation des services et des activités des bibliothèques. Le mouvement de pratique factuelle a débuté en médecine dans les années 1990 et les bibliothécaires y ont toujours été actifs. Ces bibliothécaires ont par la suite voulu intégrer la pratique factuelle dans leur propre discipline, les sciences de l’information. Traditionnellement, l’évaluation des bibliothèques se fait à partir de données récoltées localement : résultats de LibQUAL, sondage auprès des usagers, données d’utilisation des services/ressources, observation des usagers, commentaires recueillis… La pratique factuelle est généralement basée sur les données d’études publiées; bien que les données recueillies localement ne soient pas toujours assez complètes pour donner lieu à une publication, elles peuvent être conjuguées à celles de la littérature afin que les décisions puissent être prises avec une perspective plus globale. Le lien peut se faire aussi dans l’autre sens, la découverte de données probantes dans la littérature peut inspirer une collecte de données afin d’avoir une meilleure idée de la pertinence locale des données publiées dans la littérature. Un troisième élément peut être ajouté à cette combinaison : l’expertise professionnelle.
On se retrouve donc avec un diagramme qui ressemble à celui de la pratique factuelle en sciences de la santé. La pratique factuelle en sciences de l’information se trouvant à la jonction des données probantes de la littérature, les données locales et l’expertise professionnelle.
Lorie a aussi présenté une version adapté du modèle des 5 étapes de la pratique factuelle (5A) :
1-Articulate the problem
2-Assemble the evidence
3-Appraise the evidence
4-Agree on the way forward
5-Adapt (and evaluate and change)
Vous trouverez plusieurs présentations de Lorie sur les données factuelles et l’évaluation sur son compte SlideShare
Martin Morris, de l’Université McGill, a coanimé avec Blake Hawkins (University of British Columbia) une table ronde sur les besoins d’information en santé pour les usagers LGBTQ (lesbiennes, gais, bisexuel-le-s, trans et « questioning »).
Les panélistes étaient : D. Ryan Dyck (Egale Canada Human Rights Trust),Tony Nguyen (National Network of Libraries of Medicine, Southeastern/Atlantic Region), Emily Vardell (University of North Carolina at Chapel Hill), John Siegel (University of Arkansas at Little Rock) et les deux animateurs de l’atelier.
Il a été question de ce que peuvent faire les bibliothèques et bibliothécaires pour que la bibliothèque soit perçue comme un lieu accueillant et sécuritaire. Un point important est d’avoir des éléments d’inclusion : toilettes unisexes, documentation pertinente visible, etc. Poser des questions liées à la santé peut être perçu comme un risque social, surtout dans une petite ville. Beaucoup de membres de la communauté LGBTQ ne seront pas portés à s’adresser à un bibliothécaire qui n’est pas membre de leur communauté.
Pour le rôle des bibliothécaires dans la formation des professionnels de la santé aux besoins des membres de la communauté LGBTQ, il semble que la route soit longue puisqu’il faudrait d’abord qu’il y ait formation : ainsi les étudiants en médecine ne reçoivent en moyenne que 4 heures de formation durant tout le programme M.D. L’historique de la relation LGBTQ-médecins n’est pas très bon et il y a encore beaucoup de méfiance du côté LGBTQ et de manque d’information du côté des médecins.
Les professionnels de la santé et les bibliothécaires du domaine bénéficieraient beaucoup d’une formation en compétence culturelle pour mieux desservir la population LGBTQ.
Emily Vardell a présenté des ressources web d’information fiable en santé. Sa présentation est disponible en ligne. Ressource digne de mention : MedlinePlus Gay, Lesbian, Bisexual and Transgender Health.
Martin a aussi parlé brièvement de l’étude qu’il a publiée (avec K.R. Roberto) en avril 2016 sur les besoins informationnels des professionnels de la santé LGBTQ.
John Siegel a présenté les résultats d’un sondage auprès de bibliothécaires américains sur leurs aptitudes à répondre aux besoins d’information de la population LGBT. 810 bibliothécaires ont complété le sondage. De nombreux problèmes ont été rapportés par les répondants : inconfort face aux questions reliées à la sexualité, difficulté à trouver de l’information récente et valable, réactions négatives de certains usagers par rapport à la documentation LGBTQ, peur des usagers LGBTQ qu’il y ait un manque de confidentialité, vedettes matières dépassées pour l’indexation des documents, comportements de certains bibliothécaires contraires à l’éthique.
Je vous invite donc à consulter la présentation d’Emily Vardell ainsi que le guide LGBTQ Health fait par Martin.
Martin Morris présentait aussi une affiche (avec Blake Hawkins) durant ce congrès. Les auteurs ont effectué une étude de la portée (« scoping review ») du rôle du bibliothécaire dans l’accès à l’information en santé pour les membres de la communauté LGBTQ. Vous pouvez consulter l’affiche ici.
Natalie Clairoux de l’Université de Montréal a participé à un atelier sur les compétences requises pour être un bon communicateur et diffuser efficacement les résultats des activités de recherche. Natalie a abordé l’utilité de l’humour pour maintenir l’attention du public. Ses conseils clés : sourire, ne pas avoir peur d’être soi-même et ne pas inclure trop de blagues. Pourquoi utiliser l’humour? Le rire permet de créer un sentiment de groupe et de mettre l’auditoire à l’aise. L’humour est aussi un bon moyen d’établir un lien de confiance. Faut-il préparer toutes les touches d’humour? En grande partie. Il est toujours possible d’improviser, mais attention alors aux faux pas! Finalement, avec l’humour, vous conserverez toujours votre enthousiasme, même après une énième explication des MesH à des étudiants. Natalie conseille la lecture du livre suivant : Vossler, J. J., & Sheidlower, S. (2011). Humor and information literacy: Practical techniques for library instruction. Santa Barbara, Calif: Libraries Unlimited.
Natalie terminait aussi son mandat de deux ans au sein de l’ABSC / CHLA. Elle a invité les membres francophones du CHLA/ABSC à s’impliquer dans l’association afin de maintenir le volet français bien présent.
À noter qu’on a eu de la poutine au dîner de l’assemblée générale CHLA/ABSC!
Je termine avec l’affiche présentée par Vera Granikov et collaborateurs : What Are the Outcomes Associated with the Use of Online Consumer Health Information in Primary Health Care? A Systematic Review with Framework Synthesis of Quantitative and Qualitative Evidence.
Les auteurs ont fait une revue systématique afin de déterminer si la consultation en ligne d’information santé pour le grand public a un impact sur la santé des patients. Ils ont identifié des impacts positifs (implication du malade dans les soins, amélioration de la santé, meilleure communication soigné-soignant) et négatifs (baisse de la confiance envers le médecin, mauvaise utilisation- augmentation ou baisse- des services de santé, inquiétude).